Rondes paysannes et comités d’auto-défense




Il y a quelques années, dans le département de Cajamarca, les paysans, confrontés à des problèmes de vol de leur bétail par les "mafias locales" organisées par les propriétaires terriens, ont progressivement mis en place une réponse : Les Rondas Campesinas. Le document réalisé par l’Institut de Défense Légale (IDL - Instituto de Defensa Legal) de Lima s’adresse aux promoteurs de rondes paysannes, réunis au mois d’août 1993 au Centre de Formation Agro-Industriel Jesús Obrero (CCAIJO) afin de participer au premier cours sur les droits de l’homme destiné aux dirigeants des organisations d’auto-défense de l’Ocongate au Pérou. D’un usage pratique, son intérêt principal est de donner la parole aux membres et créateurs de ces institutions très particulières, et de proposer les informations clés indispensables à la compréhension des mécanismes légaux. Il souligne par ailleurs la capacité d’action des rondes paysannes tout en insistant sur les limites de l’organisation et de la législation actuelle. Un premier volet de cette formation réunit les témoignages des dirigeants de rondes et de comités d’auto-défense de la région, sur l’apparition dans leurs communautés, de pratiques alternatives. Le vol de bétails et de biens, les exactions perpétrées par les autorités judiciaires et communales en cheville avec les délinquants, conduit à l’émergence d’un organe de défense communautaire. Il est par ailleurs intéressant de noter que dans la majorité des cas cette structuration collective est facilitée par l’existence, dans les communautés voisines, de rondes paysannes. Le second volet s’articule autour de deux cas sur lesquels les participants sont amenés à réagir afin d’évaluer si l’environnement légal protège ou limite les droits des rondes paysannes et des comités d’auto-défense. Divers points de droits sont abordés pour apprécier ces cas. L’objectif est de mieux comprendre le cadre juridico-légal réglemen-tant les rondes paysannes et les comités d’auto-défense, pour que leurs dirigeants voient les limites de leurs actions et apprennent à faire valoir, à bon escient, leurs droits trop souvent bafoués par les autorités locales. Les différents types de lois (nationales/ internationales ; générales / spécifiques) sont distingués, puis la hiérarchie des lois décrite, et enfin, les lois relatives aux rondes et comités d’auto-défense sont explicitées. Les notions d’autonomie et de respect des droits de l’homme, toutes deux fondatrices de la philosophie originelle et de la raison d’être des structures collectives de défense communautaire, y sont également tout particulièrement rappelées. Un troisième volet amène les participants à comparer la législation relative aux rondes paysannes à la réglementation, plus récente, des comités d’auto-défense. En effet, les premières sont organisées par une loi de 1986, alors que les derniers sont réglementés par un décret législatif de 1991 qui impose la transformation des rondes en véritables groupes d’appui militaire. Ainsi, leur fonction originelle de résolution des conflits internes est oubliée, au profit d’une action d’auto-défense et de pacification. Cette comparaison permet de souligner le profond fossé qui distingue, tant dans leurs origines que dans leurs caractères et fonctions, ces deux types d’organisation. Il s’agit surtout de favoriser la prise de conscience des dirigeants, des réalités totalement différentes que celles-ci recouvrent. De fait, seules les rondes paysannes régies par la loi de 1986 et les statuts communaux, s’avèrent réellement démocratiques, autonomes et dévouées à la défense des intérêts communautaires. Le caractère transitoire et anti-subversif des comités d’auto-défense relevant du statut réglementaire, intimement liés aux forces militaires, ainsi souligné, est implicitement dénoncé. Enfin, le quatrième volet recense l’ensemble des alternatives possibles susceptibles de renforcer les droits, donc l’efficacité, des rondes paysannes. Des domaines d’actions sont privilégiés : capacité organisationnelle et statut juridique. Parmi les propositions formulées, notons celle du développement des rondes paysannes au niveau du district et du département, la coordination avec les organisations corporatistes, la formalisation de la reconnaissance légale et statutaire des structures de défense et enfin, l’élaboration de projets de loi en collaboration avec les différents acteurs de la démocratie.


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Mots-clés Accès à la justice - Comité de défense - Communauté villageoise - Délinquance - Droits de l’homme - Formation juridique - Justice - Justice communautaire - Organisation communautaire - Pays andin - Population rurale - Résolution extra-judiciaire des conflits -

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