Rendre effectif le droit au logement pour tous

DAL (Droit au Logement)




1 Le DAL est nĂ© d’un fait : l’existence d’une forte crise du logement entraĂ®nant l’impossibilitĂ© pour les familles les plus dĂ©munies d’avoir accès Ă  un logement dĂ©cent et donc l’obligation de squatter. L’objectif du DAL est de faire appliquer le droit au logement pour tous, garanti par les textes juridiques. Les actions collectives 2 Lorsque la nĂ©gociation entamĂ©e avec les pouvoirs publics pour obtenir le relogement de familles expulsĂ©es n’aboutit pas, des stratĂ©gies d’opposition ou de rupture sont mises en place. 3 Les actions collectives constituent l’un des modes d’action essentiels du DAL. Elles doivent accompagner toutes les autres actions, venir en complĂ©ment. En effet, mĂŞme quand le droit joue en faveur de ce que dĂ©fend le DAL (existence de lois ou de dĂ©cisions judiciaires allant dans le sens de l’application du droit au logement), il faut se battre au quotidien pour le faire appliquer, pour que les personnes concernĂ©es le respectent. 4 Ainsi, c’est en partie parce que des actions collectives mĂ©diatisĂ©es avaient Ă©tĂ© organisĂ©es que des rĂ©sultats ont pu ĂŞtre obtenus sur le plan judiciaire. 5 Les actions collectives peuvent prendre la forme d’actions de courte durĂ©e (exemple : occupation d’administrations telles que les Agences Nationales pour l’Emploi pour les obliger Ă  accepter d’inscrire les chĂ´meurs sans domicile fixe) ou d’actions plus longues comme les campements. Il ressort des luttes menĂ©es qu’il est important que les familles voient Ă  un moment donnĂ© le rĂ©sultat de leur mobilisation. 6 Dans ce mode d’action, plusieurs facteurs sont Ă  prendre en compte pour favoriser la rĂ©ussite : - l’efficacitĂ© : le choix du lieu d’un campement est par exemple primordial : les possibilitĂ©s pratiques qu’offre le terrain doivent ĂŞtre prises en compte (accès Ă  l’eau, Ă  l’électricitĂ©, …) ; les enjeux existants sur ce terrain Ă  court terme Ă©galement. Lors du « campement du Quai de la Gare » par exemple, le DAL voulait nĂ©gocier le relogement de familles avec la ville de Paris. Or, jamais elle n’aurait acceptĂ© de nĂ©gocier. Ce qui a permis Ă  l’action d’aboutir, c’est que le site avait Ă©tĂ© choisi pour la construction de la future grande bibliothèque nationale et que les travaux devaient ĂŞtre entamĂ©s rapidement : il fallait donc trouver une solution pour les familles… - l’organisation : les actions se prĂ©parent avec les familles, mĂŞme si certaines doivent ĂŞtre mises en place rapidement pour rĂ©pondre aux situations d’urgence. La formation des familles qui participent est donc importante. Il ne faut pas non plus nĂ©gliger les aspects relatifs Ă  la mĂ©diatisation, la communication. Actuellement une personne au DAL s’occupe des relations avec la presse. Il est Ă©galement fondamental d’arriver Ă  obtenir des soutiens, notamment de personnalitĂ©s reconnues. Quand un huissier envoyĂ© par le propriĂ©taire des lieux occupĂ©s constate que ce sont des personnalitĂ©s qui occupent l’immeuble, cela calme souvent le propriĂ©taire… Ce n’est pas forcĂ©ment chose facile d’obtenir ces soutiens et cela demande du temps, mais c’est essentiel. - l’action doit ĂŞtre juste : le DAL s’attaque toujours Ă  des gens qui sont rĂ©ellement en capacitĂ© de rĂ©pondre Ă  la demande, il ne s’agit pas de demander la rĂ©quisition d’un logement appartenant Ă  un petit propriĂ©taire privĂ© qui doit y loger ses enfants. Les moyens d’action utilisĂ©s sont toujours non-violents. - la lĂ©gitimitĂ© : les actions ont aussi pour intĂ©rĂŞt de faire adhĂ©rer d’autres gens Ă  la cause dĂ©fendue. Lors de l’occupation de la rue du Dragon, des habitants qui semblaient pourtant assez peu sensibilisĂ©s aux problèmes du logement sont venus nous apporter leur soutien. Les actions judiciaires 8 Dans l’histoire du DAL, elles ont Ă©tĂ© essentielles puisqu’elles ont permi de faire Ă©voluer la jurisprudence. Mais ces Ă©volutions n’auraient jamais eu lieu sans les actions collectives, plus mĂ©diatiques, organisĂ©es Ă  cĂ´tĂ©. La plupart des actions judiciaires visaient Ă  faire appliquer une loi existante (la loi de rĂ©quisition) et Ă  faire reconnaĂ®tre des droits aux squatteurs mĂŞme s’ils n’avaient pas de titres. Et c’était les occupations qui mettaient en lumière l’existence d’immeubles vides et donc la contradiction qu’il y avait Ă  ne pas appliquer la loi de rĂ©quisition ou celle de ne pas reconnaĂ®tre de droits Ă  des squatteurs qui n’arrivaient pas Ă  obtenir de logement. Sans actions collectives, avec les mĂŞmes arguments, les mĂŞmes dispositions lĂ©gislatives, les revirements de jurisprudence n’auraient sans doute pas Ă©tĂ© obtenus. 9 En tout cas, obtenir un changement de jurisprudence a Ă©tĂ© une action Ă  long terme. Le DAL a toujours demandĂ© l’application de la loi : application de la loi Besson de 1990 (« toute personne ou famille a droit Ă  une aide de la collectivitĂ© pour accĂ©der Ă  un logement dĂ©cent »), de la loi de rĂ©quisition, … Le problème rĂ©sidait principalement dans le fait qu’on Ă©tait en prĂ©sence de deux droits contradictoires : le droit au logement et le droit de propriĂ©tĂ©. Les magistrats se trouvaient confrontĂ©s Ă  de plus en plus de demandes d’expulsions et ne savaient pas comment concilier ces deux droits. Alors ils accordaient le plus souvent les dĂ©lais autorisĂ©s par la loi, allant mĂŞme souvent au-delĂ  des 2 mois prĂ©vus. Sur cette question des dĂ©lais, le DAL a « sensibilisĂ© » les magistrats qui ne savaient pas tous qu’ils avaient la possibilitĂ© d’accorder des dĂ©lais, mĂŞme quand les familles ne le demandaient pas. Une campagne d’information a Ă©tĂ© menĂ©e en collaboration avec le syndicat de la magistrature. 10 Pour motiver leur jugement, les juges Ă©voquaient les conditions de vie des familles, rappelaient les dispositions de la loi Besson, mentionnaient toutes les demandes de relogement que les familles avaient faites et qui Ă©taient restĂ©es sans rĂ©ponse… Un arrĂŞt important a par exemple Ă©tĂ© pris en 1993 : la Cour d’Appel de Paris a accordĂ© un dĂ©lai de 6 mois avant l’expulsion en mentionnant l’état de nĂ©cessitĂ© dans lequel se trouvaient les familles. Cette dĂ©cision a peut-ĂŞtre Ă©tĂ© influencĂ©e par le fait que la Mairie de Paris avait dĂ©jĂ  exĂ©cutĂ© l’expulsion ordonnĂ©e en rĂ©fĂ©rĂ© (procĂ©dure d’urgence) sans attendre le jugement dĂ©finitif et que cela a Ă©nervĂ© les magistrats (mĂŞme si en droit le rĂ©fĂ©rĂ© n’est pas suspensif…). 11 Et puis il y a eu la dĂ©cision du Conseil Constitutionnel de 1995 qui a fait du droit au logement un principe Ă  valeur constitutionnelle… et enfin la dĂ©cision du Tribunal de Paris de 1996 qui a dĂ©boutĂ© la ville de Paris de sa demande d’expulsion en mentionnant que « le droit au logement mĂ©ritait protection au mĂŞme titre que le droit de propriĂ©tĂ© ». Mais malgrĂ© ces dĂ©cisions, le droit au logement n’est toujours pas un droit opposable dans les faits et il faut continuer Ă  se battre pour le faire appliquer. Les actions juridiques de lobbying 12 Chaque nouvelle loi ou projet de loi doit ĂŞtre connu et analysĂ©. Il est essentiel de pouvoir en comprendre les consĂ©quences et savoir si des dispositions doivent ĂŞtre modifiĂ©es. Des rĂ©unions avec les militants sont donc organisĂ©es. Les projets ou les lois y sont collectivement discutĂ©s pour que chacun prenne connaissance du contenu. Quand l’enjeu est important, le DAL mène des actions de sensibilisation et des actions de pression auprès de dĂ©putĂ©s. Par exemple, lors du vote de la loi sur l’exclusion en 1998, les militants ont campĂ© devant l’AssemblĂ©e Nationale et des tracts ont Ă©tĂ© distribuĂ©s aux dĂ©putĂ©s… 13 Quel que soit le type d’action menĂ©, il faut ĂŞtre particulièrement rigoureux dans le montage des dossiers : mener des enquĂŞtes, aller sur le terrain rencontrer les familles pour ĂŞtre surs qu’il n’y ait pas d’erreur quand Ă  l’apprĂ©ciation de leur situation, obtenir tous les justificatifs pour prouver leur situation. La formation des familles militantes 14 La formation est essentielle pour permettre aux familles de s’approprier la lutte. Celle que propose le DAL aux familles porte avant tout sur des questions techniques qui les intĂ©ressent directement : les expulsions, les questions d’insalubritĂ©, … mais elle concerne aussi le droit en gĂ©nĂ©ral : comment il se construit, qui en est Ă  l’origine, etc. Finalement, on se rend compte que ces questions passionnent les gens. La formation aborde Ă©galement les aspects relatifs aux techniques de lutte collective : l’organisation d’un campement, d’une occupation, etc. Il est certain que l’appropriation des connaissances reçues, juridiques ou non, de leur implication ensuite dans l’action, dĂ©pend de chaque famille. Mais ces formations ont permis de mobiliser davantage de personnes sur les actions juridiques.


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Mots-clés Action juridique et judiciaire - Droit au logement - Légitimité - Mobilisation populaire - Production de droit -

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