Droit et démocratie : quelles pratiques ? quelles résistances ?




"Il est navrant de voir à quel point, dans notre système démocratique, les gens démis-sionnent de leur rôle quotidien de citoyen. Il ne saurait y avoir de tragédie plus sombre et plus meurtrière pour un homme que la mort de sa foi en lui même et dans ses possibilités de maîtriser son destin". C’est avec ces mots de Saul Alinsky, que s’ouvre le compte- rendu des sessions d’été de la CIMADE (Service Oecuménique d’Entraide) au CUN du Larzac (11-14 juillet 1991). Quels rapports s’établissent-ils entre droit, loi, justice et citoyenneté ? Peut-on concevoir et exercer un droit à être producteur de droits ? Comment la connaissance de ses droits et la surveillance de l’application de la loi peuvent-ils faire en sorte que les individus ne se dépossèdent pas des problèmes qui les concernent, et deviennent finalement des acteurs et des producteurs de leur propre réalité ? Toutes ces questions sont au centre d’un large et riche débat, qui montre au delà des frontières, comment des notions qui peuvent être perçues comme abstraites, compliquées, réservées aux seuls détenteurs des techni-ques juridiques, peuvent par une pratique collective devenir l’affaire de tous les cito-yens. C’est ainsi que les "Maisons Juridiques Populaires" travaillent au Chili pour permet-tre un rapprochement entre le droit et les usagers du droit. A Paris, Lyon, Avignon, les "Boutiques de droit" proposent leurs servi-ces en tant que médiateurs et permettent de régler des conflits locaux entre usagers. Dans ces pratiques, la médiation n’est pas du res-sort de la gestion judiciaire, mais implique une conception à visée plus sociale, plus en accord avec les fondements du droit et de la participation où la loi est affaire de tout le monde, et elle vise la reconstruction du tissu social, la réconciliation entre les différents protagonistes. C’est aussi le cas d’une expérience qui commence à faire école, celle des "Instances de conciliation" à Valence. Il est demandé aux gens du quartier de régler leurs conflits par des moyens qui excluent la sanction, en responsabilisant les différents protagonistes, pour que prime en définitive l’intérêt de la communauté et l’amélioration du climat social. Mais, souligne Jean Designe, l’un des instiga-teurs de ces rencontres, la situation actuelle reste que les gens subissent plus le droit qu’ils ne le connaissent et l’utilisent. Et que dire de la situation dans des pays où l’Etat n’est pas garant des droits élémentaires de l’individu, où ces droits sont bafoués ? Le rapport entre légalité et légitimité est parfois contradictoire, il ne suffit pas d’affirmer que le sentiment du premier est lié au second, et que la légalité doit exprimer la volonté populaire, encore faudrait-il que les majorités puissent réellement s’exprimer. L’expérience du réseau SOLEX (Solidarité contre les Expulsions des étrangers du territoire français), soutenu entre autres par la CIMADE, montre à ce titre que désormais il faut que ce ne soit plus la légalité qui crée la légitimité, mais bien l’inverse.


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Mots-clés Citoyenneté - Confrontation d’expériences - Démocratie - Droit - Echanges d’expériences - Formation - Justice - Légitimité - Médiation juridique - Participation populaire - Pratique du droit - Service juridique -

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